Le 2 août 1914, tandis que le tocsin retentit dans toute la France, un flot d’étrangers assaille nos bureaux de recrutement.
Les nombreux bataillons qu’il fallut former sont groupés en régiments de marche, dès novembre 1914. C’est vraiment la cohorte des Nations. Cinquante y sont représentées. On y parle plus de langues qu’au pied de la biblique tour. Les Français et les Suisses ont apporté le plus fort contingent. Cependant, de mois en mois, les effectifs des quatre régiments existant s’amenuisèrent du fait des pertes au feu, la maladie ou le départ des sujets alliés auxquels la latitude fut donnée de rejoindre leur Armée.
A partir de novembre 1915, un seul régiment subsistera, il prendra le nom de « Régiment de marche de la Légion étrangère », un nom qui sera porté sur les ailes de la renommée.
Pendant les quatre années de guerre, des officiers supérieurs de haute valeur commandèrent les Régiments de Légion sur le front de France. Citons les colonels Pein, Cot, Duriez et Rollet, tous issus de la Légion étrangère. Deux d’entre eux, Pein et Duriez seront mortellement blessés au cours de deux grandes batailles.
Tandis que de nouveaux régiments de Légion se forment en France pour combattre les Allemands, les Autrichiens, les Turcs et les Bulgares, les unités restant en Afrique du Nord, au Maroc notamment, et au Tonkin, conservent leurs éléments allemands, autrichiens, turcs et bulgares qui allaient contribuer à la défense de l’Empire français.
Ainsi se présente la Légion aux premiers mois de la guerre. Elle va accumuler les exploits, engagée partout où le choc sera le plus rude à donner ou a recevoir, prenant à peine le temps après chaque bataille de panser ses plaies et à reformer ses rangs. Sa bravoure et son esprit de sacrifice appartiendront bientôt à la légende. En1862, lors du départ du Régiment étranger pour le Mexique, le général Deligny avait dit: « Légionnaires, votre Drapeau n’a pas de plis assez amples pour y inscrire tous vos titres de gloire. » Depuis, cette parole n’a cessé de se vérifier. De 1914 à 1918 des décorations ne cessèrent pas de recouvrir la cravate de l’emblème arboré par le R.M.L.E.
Le 2ème de marche du 1er Etranger, ce régiment dont les éléments africains ont quittés Bel-Abbès le 24 août, se rassemble au camp de Mailly à partir du 25 septembre et y demeure jusqu’à la fin octobre. A ce moment, le Régiment dont l’instruction et l’amalgame sont terminés, est affecté à la 1ère Brigade de la Division marocaine et vient occuper successivement les secteurs de Prunay et de la Pompelle en Champagne.
Le colonel Pein, « le conquérant des Oasis » dont le nom reste attaché à l’épopée du Sud-Oranais, commande le Régiment jusqu’au moment où ce dernier, quittant la Champagne, va participer à la bataille d’Artois.
Artois, mai-juin 1915
Le 9 mai au petit jour, les unités se massent. L’objectif est la cote 140. A 10 heures, des tranchées, la ligne bondit littéralement, elle surgit au son de la charge, successivement les bataillons Noiré, Muller, Gaubert, du Régiment Cot et à gauche les bataillons du Régiment Demetz. C’est la ruée, la lutte d’homme à homme, car le canon n’a pas fait ce qu’il sut faire plus tard. Les balles sifflent de tous côtés, les mitrailleuse crépitent avec rage. Déjà, les commandants Noiré, Muller et Gaubert sont tués, avec les capitaines Lehagre, Boutin, Jourdeuil, Osmont et tant d’autres. Le lieutenant-colonel Cot est blessé. A 11h30, l’objectif est atteint. Mais malheureusement, faute de réserves fraîches, la croupe de la cote 140 ne peut être maintenue. Le bilan des pertes se révèle très lourd. Cinquante officiers et 1889 légionnaires manquent à l’appel.
Le commandant Collet, seul chef de bataillon resté debout, prend le commandement du Régiment reformé à deux bataillons jusqu’à l’arrivée des renforts.
Le 16 juin, le régiment prend part à l’attaque de Givenchy. De nouveau, 21 officiers et 624 hommes tués, blessés ou disparus sont la rançon de cette nouvelle tentative de l’impossible percée.
Envoyé dans la région de Montbéliard puis en Alsace, le régiment reçoit les renforts du 3ème de marche du 1er Etranger dissous. L’effrayante fournaise de d’Artois et de Champagne a réduit à tel point le Régiment qu’il est dissous. Le 11 novembre 1915, l’ancien 2ème de marche du 1er Etranger entre dans la composition du Régiment de marche de la Légion étrangère.
Le 2éme de marche du 2ème Etranger, comme le 1er Etranger de Bel-Abbès, le Régiment de Saïda fournit l’ossature d’une unité de Légion qui, elle aussi, vint compléter son instruction au camp de Mailly après avoir reçu les engagés. Il sera engagé au sein de la 1ère Brigade de la Division marocaine. Jusqu’en septembre 1915, le Régiment tiendra différents secteurs dans les régions de Reims et de Paissy. Il se rend ensuite au repos en Haute-Saône puis en Champagne pour prendre part à la grande bataille qui se prépare. Sa participation aux combats de Souain et de la ferme de Navarin lui ont couté: 14 officiers dont le lieutenant-colonel Leconte-Denis, blessé, et de 300 hommes tués ou blessés.
C’est après avoir reçu un nouveau chef, le lieutenant-colonel de Lavenne de Choulot, que le Régiment est fondu dans le nouveau R.M.L.E à Verberie.
Le 3ème de marche du 1er Etranger, sa création est dû au grand nombre de demandes d’engagement à la caserne de Reuilly. La nouvelle unité prend le nom de « Régiment de marche de la Légion étrangère du camp retranché de Paris », le 28 novembre 1914, à la fin de son instruction. Son commandement est confié au colonel Thiébault, de la Légion de gendarmerie de Paris. Le Régiment mène ses premières actions sur le front de la Somme. A partir du 30 mars 1915, le 3ème de marche est employé dans le Santerre.
La libération d’un important contingent d’Italiens, de Belges et de Russes dont chaque groupe rejoint son armée nationale respective, fait décider la dissolution du Régiment dont les derniers éléments sont dirigés sur le 2ème de marche du 1er Etranger (juillet 1915). Depuis le 20 novembre 1914, le 3ème de marche était commandé par le lieutenant-colonel Desgouille.
Le 4ème de marche du 1er Etranger, c’est également au camp de Mailly que ce Régiment rejoignit les autres unités de Légion au début de novembre 1914.Il est constitué de trois bataillons de Garibaldiens et commandé par le lieutenant-colonel Giuseppe Garibaldi.
Le 14 décembre, le 4ème de marche est appelé à faire ses preuves et, le 26, il reçoit son baptême du feu dans le bois de Bolante, en Argonne. Son attaque échoue et ses pertes son sévères. Une nouvelle action le trouve à l’attaque des Courtes Chausses. C’est un succès. En janvier 1915, le Régiment fournit un nouvel effort, sans réussir dans sa tentative.
En mars, par suite d’une entente avec le gouvernement italien, le 4ème de marche est dissous. Les hommes rejoignent l’Italie à l’exception de quelques volontaires qui sont incorporés dans d’autres régiments de Légion.
Ces trois mois de campagne ont couté 429 tués aux garibaldiens.
Le R.M.L.E, formé le 11 novembre 1915, avec les éléments des Régiments de marche du 1er et 2ème Etranger, est considéré comme une des unités de choc par excellence. Il est constitué de trois bataillons sous les ordres du lieutenant-colonel Cot.
De décembre 1915 à juin 1916, La Division marocaine demeure à l’instruction ou occupe différents secteurs dans la région de Roye-Lassigny.
Le 4 juillet 1916, la bataille de la Somme commence. Le R.M.L.E est engagé dans la lutte pour l’enlèvement du village de Belloy-en-Santerre. La Légion ramène 750 prisonniers dont 15 officiers. Le prix de ce succès fut la mise hors de combat, près du tiers de l’effectif du Régiment.
Le 8 et 9 juillet, la tentative d’enlèvement du terrible boyau du Chancelier , sans succès, coûtent d’autres pertes sévères.
Après s’être réorganisé dans l’Oise, le R.M.L.E monte en ligne, à la fin de l’année, dans la région de Santerre. Au mois de février 1917, le lieutenant-colonel Cot est remplacé à la tête du Régiment par le Lieutenant-colonel Duriez. Le lieutenant-colonel Duriez sera tué, le 18 avril, au cours des combats d’Aubérive. Le chef de bataillon Deville le remplace. Aubérive est enlevé, par le R.M.L.E, aux prix de lourdes pertes.
Le 30 mai 1917, à Mourmelon-le-Grand, le lieutenant-colonel Rollet prend la tête du Régiment.
Le 14 juillet, le R.M.L.E défile à Paris. Au cours de la revue, le président Poincaré attache la fourragère aux couleurs de la Médaille Militaire à la pique du Drapeau.
Sources: Livre d’or de la Légion étrangère
http://www.fanion-vert-rouge.info/1914-1918_artois_somme.htm